vendredi 29 mars 2013

Porcelaine : légende du tigre et de la tisseuse - Estelle Faye


Ca ne sera pas la première fois que je craque sur un bouquin des Moutons électriques uniquement pour la couverture, bien au contraire. Et puis une histoire de légende chinoise (moi qui dévorais les Pearl Buck dans ma jeunesse), comment voulez-vous résister ? J’ai donc « testé » l’auteur sur une nouvelle, et une heure plus tard je repartais avec l’ouvrage fraichement dédicacé !

(Ne me regardez pas comme ça, j’ai juste lu la nouvelle avant d’aller à Zone Franche où dédicaçait l’auteure, tout simplement, c’est juste une affaire d’organisation et de timing niveau bus !)

Porcelaine : légende du tigre et de la tisseuse nous emmène sur les traces de Xiao Chen, un jeune garçon un jour frappé d’une malédiction, qui le condamnera à une vie d’errance en compagnie d’un cirque ambulant… jusqu’à que bien des années plus tard, sa route croise celle de Li Mei, fille d’un marchand de soie.

Mélangeant habilement mythes et contes, dieux et créatures féériques, Porcelaine porte très bien son sous-titre, les premières pages m’ayant immédiatement évoqué le souffle légendaire de Princesse Mononoke dans cette façon de mettre en scène mythologie et folklore asiatique (d’ailleurs j’écris cette chronique avec la BO en toile de fond, ça fonctionne tout à fait).

A ce titre, Porcelaine est un très beau roman, qui mêle habilement tout ce qu’on peut attendre d’une promenade mythique en Chine : entre deux créatures féériques cruelles, on évoque fabrication de la soie, poterie (la technique de la porcelaine y est détaillée avec beaucoup de précision) et théâtre-cirque ambulant.

On laisse facilement porté par cette ambiance au gré des péripéties qui nous emmène des petits villages au bord du Fleuve Jaune à la Cité Interdite de Pékin, via la visite de monuments légendaires (dont ce que je présume être le tombeau de Qin) et les steppes mongoles (spéciale dédicace à Tigger Lilly !).

En cela, Porcelaine m’a évoqué les textes de Léa Silhol ou de Tanith Lee, mais dans un style beaucoup moins baroque. On trouve bien pire comme affiliation dans le domaine de l’exploitation du conte et du mythe !

Mais (oui parce qu’il y a un mais), deux choses m’ont tout de même dérangé à la lecture. La première, c’est la quatrième de couverture qui m’a induit en erreur (léger spoiler, mais rien de critique) :
« […] Pendant près de quinze siècles, rivalités et amour s’entrecroisent, tissant une histoire de passion, de tendresse et de sacrifice, sur fond de magie et de théâtre. ».
Très jolie formule, sauf que l’histoire ne se déroule absolument pas sur quinze siècles. Enfin plus précisément, elle se déroule au IIIe siècle ap. J.C. (époque des Trois Royaumes), PUIS au XVIIIe siècle (dynastie des Qing), avec entre les deux une monstrueuse ellipse, à propos de laquelle on a bien peu d’éléments.

Moi qui m’attendais à traverser l’Histoire, ça m’a complètement frustrée, ce qui est vraiment dommage parce que je l'ai remâché tout au long du roman, me gâchant pas qu'un peu la lecture.

La deuxième, c’est que j’ai eu beaucoup de mal à rentrer dans les personnages, à compatir, à partager leurs émotions.

Li Mei est quasi-parfaite, telle une princesse de conte de fées, et finalement elle se caractérise avant tout par ses nombreuses qualités (son don pour les costumes, son courage, etc.), plus que par ses sentiments (elle aime Xiao Chen, certes, mais ça ne m’a pas fait vibrer, et elle, tout le monde l’aime ou presque).

Même chose pour Xiao Chen, passé par la première partie, à part une envie de le secouer par moment, il m’a laissé un peu froid. En fait ce sont des authentiques personnages de conte : ils appellent au rêve, mais ce sont un peu des figures archétypales qui semblent venir de toutes les histoires plutôt que d'une seule (le prince maudit, la jeune fille qui va vaincre la malédiction, etc.), on ne vibre pas forcément avec eux.

Un bilan un peu mitigé donc, à modérer tout de même. Si cette quatrième de couverture ne m’avait pas induit en erreur (scrogneugneu), j’aurais passé un bien meilleur moment de lecture. D’ailleurs à feuilleter l’ouvrage pour le chroniquer, j’avais presque envie de le relire, cette fois-ci avec les bonnes cartes en main, pour en avoir un meilleur avis.

Si on laisse de côté cela donc, Porcelaine est un roman tout à fait honorable dans la veine « mythologique » de la fantasy. Il a de plus le mérite d’exploiter un terrain encore relativement frais (du moins de mon expérience de lectrice, je n’ai pas lu beaucoup de romans exploitant la mythologie chinoise, à l’exception de la Magnificence des Oiseaux de Barry Hughart).

Et puis, parce que parfois ça compte, il faut reconnaitre que l’objet en lui-même est superbe : la couverture (signée Amandine Labarre) se poursuit sur les rabats intérieurs, et le motif de l’arbre est repris sur les premières pages… Porcelaine est un livre vraiment agréable à lire, qu’on contemple avec plaisir.



Il serait facile d’opter pour la version numérique (à 6 euros !), mais ce serait bien dommage de se priver d’un beau livre comme ça, qui ne coûte finalement « que » vingt euros, ce qui n’est pas excessif pour un (beau) bouquin des Moutons électriques.

CITRIQ

11 commentaires:

  1. Superbe objet, en effet, comme souvent avec les Moutons Électriques !
    Ceci dit, je ne sais toujours pas si ce roman peut me plaire, il y a toujours du pour et du contre dans les critiques que j'ai lues...
    Je sens que je vais tirer à pile ou face ! :P

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  2. Je suis allée faire un petit tour sur le net, l'ensemble des chroniques est plutôt positif, limite c'est moi qui suis en retrait en comparaison xD.
    Je pense que j'avais un peu trop d'attentes en fait, du coup forcément comme c'est pas un gros coup de coeur au final, même si c'est un joli texte... bref tout ça pour dire que je ne serai quoi te conseiller, pile ou face ça m'a l'air pas mal en effet :D

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  3. Ralala, il faut savoir faire abstraction des attentes suscitées par le net et le synopsis.

    Je comprends que ça puisse te frustrer (sans vouloir te citer), mais en même temps, je trouve ça dommage que cela te frustre, parce qu'au final, ce n'est pas très important.

    Et est-ce que tu prends ce texte autrement qu'un conte ? Ca me semble normal que les personnages apparaissent comme dans un conte, puisque ce texte me semble être voulu comme un conte par l'auteure.

    M'enfin bon, j'essaie de te convaincre que tu as apprécié ta lecture plus que ce qui ne transparait dans ta chronique, mais c'est probablement vain ^^.

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  4. J'ai déjà sué (sans mauvais jeu de mots :P) pour que cette frustration ne transpire pas trop figure toi xD.

    Bah je suis pas dans une bonne phase lecture en ce moment, donc ça ne sert à rien de forcer la chose, au pire je le relirais dans un an et je corrigerais mon avis en conséquent ^^

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  5. C'est vrai que la couv est superbe, elle m'avait d'ailleurs tapé dans l'oeil quand elle était sur la table à la librairie.

    Bon, mais moi il m'en faut plus que la couverture pour que je craque :D

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  6. Genre ça t'es jamais arrivé d'être tentée juste par une couverture ^^

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  7. Jamais, de jamais, de jamais. C'est tellement mal me connaitre :D

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  8. Nan mais atta y a des steppes mongoles dans le livre ET une couverture avec un tigre ! Rhaaaaa. Je crie au complot !

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  9. Yek yek yek
    (et encore j'ai ptêtre pas relevé, y'avait ptêtre des lys aussi :P)

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  10. C'est définitif, la couverture est trop belle, il va me falloir un jour. Un jour.

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  11. C'est une bonne raison d'investir en effet ^^
    (une libraire à Chambé m'a dit qu'elle en avait vendu plein rien que pour ça)

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