Cet été, j’ai fait un peu de rangement dans la bibliothèque que j’entretiens chez mon père, et j’ai retrouvé tout un tas de livres non lus ou jamais terminés pour des raisons diverses et variées. En tombant sur celui-là, j’avoue avoir eu l’impression de découvrir le Graal.
En effet ce livre n’abrite rien de moins qu’un récit post-apocalyptique publié en 1912 ! Il y a eu bien d’autres textes apocalyptiques écrits depuis la nuit des temps, me direz-vous (les gens ont toujours eu le chic pour inventer des mythes de création ET de destruction du monde), mais là c’est de la SF ! De 1912 ! Il n’y a que moi que ça fait trépigner ?
La mort de la Terre est en fait un recueil de trois textes, la novella éponyme et deux autres nouvelles, et je ne peux résister à l’envie de détailler un peu le contenu de ces histoires.
Le recueil s’ouvre sur Les navigateurs de l’infini, une nouvelle publiée pour la première fois en 1925, qui nous raconte l’aventure des trois premiers hommes à poser le pied sur Mars. Ils y découvrent un écosystème très différent, avec de bien étranges zoomorphes, et toute une panoplie d’espèces dont la particularité est de ne pas présenter la bilatéralité qui domine sur Terre (deux yeux, deux bras, etc.) mais des formes plutôt ternaires (trois jambes, etc.).
C’est assez marrant à lire, car terriblement désuet dans le vocabulaire (ah les radiogènes et les torpillettes), mais pourtant très juste dans l’invention d’une autre espèce intelligente complètement différente mais avec laquelle ils parviennent à communiquer petit à petit (même si le côté « les terriens sauvent tout le monde » est un peu blasant).
Vient ensuite Le cataclysme (écrit en 1888 !), un texte assez halluciné qui m’a fait penser tout du long à Melancholia, avec cette histoire d’un couple vivant sur une péninsule isolée où d’étranges phénomènes annoncent une catastrophe (mais il ne s’agit pas d’une planète qui rentre en collision avec la Terre, promis !).
Et puis il y a la novella éponyme du recueil, La mort de la Terre. Titre un peu trompeur au demeurant, car Rosny Aîné ne raconte pas tant la mort de la Terre que la disparition des derniers êtres humains, conséquence de la disparition progressive des ressources naturelles (surtout de l’eau) et de nombreux bouleversements tectoniques.
« Depuis cinq siècles, les hommes n’occupaient plus, sur la planète, que des îlots dérisoires. L’ombre de la déchéance avait de loin précédé les catastrophes. A des époques fort anciennes, aux premiers siècles de l’ère radioactive, on signale déjà la décroissance des eaux : maints savants prédisent que l’Humanité périra par la sècheresse. Mais quel effet ces prédictions pouvaient-elles produire sur des peuples qui voyaient des glaciers couvrir leurs montagnes, des rivières sans nombre arroser leurs sites, d’immenses mers battre leurs continents ? »
Ca a un petit côté visionnaire non ? C’est vraiment un texte marrant à lire, parce que si certains passages sont presque prophétiques, comme l’auteur s’est vraiment appuyé sur les grandes découvertes de l’époque pour écrire son texte (d’où son « ère radioactive », aujourd’hui on parlerait plutôt d’ère nucléaire), on se retrouve avec des choses désuètes voir complètement fausses à l’heure actuelle.
Il prend ainsi bien en compte l’existence des microbes et autres organismes microscopiques, mais considère qu’avec la disparition de tous les animaux (à l’exception de quelques oiseaux), le vecteur de propagation a également disparu. Et c’est assez rigolo de voir les derniers humains prendre des repas « de gluten concentré et d’hydrocarbures essentiels ».
Cependant le texte est assez touchant, et doucement mélancolique, avec ces communautés humaines réduites, vivant globalement en paix, qui vivent sur leurs réserves et acceptent avec une certaine paix leur disparition prochaine.
C’est assez poétique en fait, surtout que la fin de l’humain est ici présenté comme un début pour une nouvelle ère, celle des ferro-magnétaux, forme de vie basée sur le fer (mais uniquement celui travaillé par l’homme) qui conquiert petit à petit la planète.
Bref, c’est un texte désuet mais extrêmement joli, que j’ai eu grand plaisir à lire. Dans la foulée, je me suis donc renseignée sur l’auteur (j’étais un peu intriguée, il a un prix littéraire à son nom quand même) et découvert qu’il s’agissait en fait de l’auteur de La guerre du feu (on ne se moque pas de mon inculture, déjà je savais que ce n'était pas juste un film, c'est bien non ?).
Serge Lehmann a récemment édité un gros recueil, La guerre des règnes, dans la collection Trésors de la SF chez Bragelonne, qui contient outre La guerre du feu, un certain nombre de nouvelles dont celles dont je viens de vous parler. Ca m’a l’air très alléchant pour qui voudrait découvrir l’auteur plus avant.
Une chose est sûre en tout cas, je suis contente d’avoir retrouvé ce petit bouquin, car j’ai pris grand plaisir à lire cette fin du monde presque ancestrale !
Bon, je pense que tout le monde s'en doute, mais je ne pense pas que ça soit pour moi :D
RépondreSupprimerSans blague xD.
SupprimerÇ'a l'air cool ! Sympa le côté désuet !
RépondreSupprimerC'est quelque chose que j'adore (je suis masochiste, oui, je sais)
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