mercredi 4 décembre 2013

Paris futurs (anthologie)


Ca faisait un petit moment que je lorgnais sur la collection numérique ArchéoSF, sans jamais oser me lancer. Les vieux textes, ça a son charme, mais des fois on a bien du mal à les lire. J'ai craqué finalement sur une petite anthologie, Paris futurs, parce que j'étais très curieuse de voir comment on imaginait le futur de la ville au XIXe siècle.

Et je n'ai pas été déçue du voyage parce qu'en cinq nouvelles on a le droit à un véritable festival de folies des grandeurs pour ce qui est de réinventer la capitale de la tête aux pieds. On trouve beaucoup d'utopies architecturales (ville circulaire, bâtiments tous identiques...)... mais aussi pas mal d'horreurs qui mélangent tellement de styles que la description m'en donne des frissons !

C'est marrant, la plupart des textes parlent de la ville, un peu (voire beaucoup) de son mode de gouvernance, mais très peu des habitants qui à en croire les auteurs sont toujours les mêmes. Et puis ils ont des obsessions qui semblent complètement folles maintenant : à les croire, on vivrait bien mieux sans jamais mettre le nez dehors, et on devrait interdire la nuit, la pluie, et tant qu'à faire bannir la nature en général !

Du coup c'est le genre de texte qui est idéal à lire sur liseuse parce qu'on peut surligner ainsi tout un tas de citations hilarantes, dont voici une petite sélection pour vous allécher :

« Ce chef, choisi par la nation, sera le plus beau, le plus intelligent et le plus fort de son royaume »
Théophile Gautier, Paris futur (au moins c'est simple)

« Il faut rendre enfin Paris habitable, et surtout instituer le divorce de l’homme et du parapluie »
Joseph Méry, Paris futur (qui démontre scientifiquement qu'on peut se débarrasser de la pluie en tirant des coups de canon dans les nuages)

« D’ailleurs un perfectionnement ingénieux s’était introduit dans la fabrication des squares. L’administration les achetait tout faits, sur commande. Les arbres en carton peint, les fleurs en taffetas, jouaient largement leur rôle dans ces oasis, où l’on poussait la précaution jusqu’à cacher dans les feuilles des oiseaux artificiels qui chantaient tout le jour. Ainsi l’on avait conservé ce qu’il y a d’agréable dans la nature, en évitant ce qu’elle a de malpropre et d’irrégulier. »
Victor Fournel, Paris futur (qui s'imagine une ville tracée au cordeau où l'on n'a pas hésité à déplacer les grands monuments, alors s'encombrer d'arbres, faut pas y penser !)

« Du reste, ce qui aida beaucoup le Gouvernement socialiste à solder ses propres dettes et celles des régimes antérieurs, ce fut l’établissement de l’impôt sur le revenu.
Ce nouvel impôt était assis de la manière suivante. Il était proportionnel au revenu tant que celui-ci ne dépassait pas 12,000 fr. par an. Mais, au-dessus de ce chiffre, il devenait total, c’est-à-dire qu’il confisquait purement et simplement tout ce qui excédait la somme réglementaire de 12,000 fr.
[...]
Sur les 100,000 fr., il en prenait 88,000 pour l’État et n’en laissait que 12,000 à l’exproprié. Celui-ci grognait bien un peu en se voyant ainsi réduit à la portion congrue, mais comme l’impôt en question, avait été voté par les Représentants du pays et que l’Administration veillait à sa stricte exécution, il n’y avait aucune réclamation à faire et il fallait, bon gré mal gré, se soumettre à la loi. »
Tony Moilin, Transformation de Paris (une magnifique utopie socialiste où tous les immeubles sont reliés entre eux et où on ne met plus le nez dehors)

« Du tombeau d’un poète nommé Victor Hugo, un peu moins connu que Homère, son ancêtre, on a fait un autel pour les poètes présents et futurs, mais on doute que ce poète ait existé, comme on doute de l’existence d’Homère. On a retrouvé quelques pages de la Légende des Siècles, pages sublimes échappées aux fureurs des guerres et des révolutions. Les critiques se disputent sur le point de savoir si c’est Hugo qui a écrit les Méditations attribuées à un nommé Lamartine et les Nuits, attribuées à un nommé Musset. »
Arsène Houssaye, L'an trois mille sept cent quatre-vingt-neuf (un auteur qui voit loin pour le coup).

Il n'y a que pour le dernier texte, L'inscription, de Eugène Fourrier, que je n'ai relevé aucune citation. Mais c'est un texte assez rigolo (et non dénué d'humour) sur les découvertes archéologiques du futur, une belle manière de clore ce recueil.

Bref vous l'aurez compris, dans le genre chouette initiative numérique, ce petit recueil est fort plaisant (et rigolo avec ça). Nul doute que je reviendrais faire un tour chez ArchéoSF à l'occasion (en plus les couvertures sont super sympas, ça compte, même en numérique !)

11 commentaires:

  1. La couv est en effet très sympa, j'ai lorgné dessus un moment. A cause de toi je vais de nouveau lorgner dessus.

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  2. Il est vrai que ça donne envie, les citations sont magnifiques (surtout celle de Tony Moilin, Ô ironie, Ô science-fiction). =D

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  3. @Baroona
    C'est encore plus délicieux quand on lit ça alors qu'on se demande comment diable on va payer sa taxe d'habitation ^^.

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  4. Comme Tigger Lilly j'avais lorgné dessus un moment un peu à cause de la couv'. :)

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  5. (posté trop vite).
    et là tu me donnes bien envie de craquer dessus...

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  6. @Tortoise
    C'est une jolie gourmandise en effet ^^

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  7. Oui, tu es une ville tentatrice, l'anthologie a l'air sympa et est à un prix presque raisonnable (chose rare en numérique !) ! Je la note dans ma PAA (pile à acquérir) !

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  8. @JainaXF
    La "ville tentatrice" c'est Paris, moi je fais que faire suivre :P

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