dimanche 3 juin 2018

Cinquante nuances de Grey – E L James


C’est dommage, à deux mois près, je tenais là ma chronique du premier avril. Sauf que ce roman et moi, c’est avant tout l’histoire d’une rencontre, rien de moins que cela.

(là vous êtes intrigués, non ? Vous avez un peu peur aussi ?)

Rien ne me destinait à la base à lire Cinquante nuances de Grey, jusqu’à que je tombe dessus dans la boîte à livres de mon immeuble. D’habitude s’y s’accumulent plutôt des manuels d’informatique obsolètes et autres ouvrages désuets (j’ai récupéré un vieux bouquin des années 1920 sur la syphilis pour ma cousine médecin !), mais j’ai fait une sacrée pioche il y a quelques temps en tombant sur deux textes de Van Vogt et ce roman.

Je n’aurais probablement jamais payé pour lire ce phénomène qui a beaucoup fait parler de lui en son temps, mais comme j’avais la possibilité de le lire gratuitement, j’ai tenté l’expérience. Après tout, j’avais déjà lu Twilight, et tant qu’à se moquer de quelque chose, autant savoir de quoi on parle ! Du coup je l’ai lu, et maintenant, je peux en parler !

La première chose à savoir sur Cinquante nuances de Grey, c’est qu’à l’origine c’était une fanfiction Twilight. Si si je vous jure, et quand on sait ça, ce livre prend tout son sens.

A l’origine c’était donc une fanfiction, une dans cette veine qui s’amuse à réécrire l’histoire en replaçant les héros dans un contexte totalement différent (où par exemple Harry Potter est garagiste, Dragon Malfoy représentant en aspirateurs et le professeur Rogue est un gigolo). Ici exit la lycéenne et le vampire, bonjour la jeune diplômée et le jeune milliardaire. Et vu qu’on est dans une fanfiction, on ajoute ce qui manque toujours dans l’œuvre originale : le sexe !

A partir de là on part dans une histoire d’amour très classique de coup de foudre au premier regard, mais avec des difficultés bien entendu, car Christian Grey n’est pas juste riche et beau, mais accessoirement psychorigide et adepte de pratiques SM (remarquez c’est toujours mieux que d’être un vampire !), ce qui n’est pas forcément simple à accepter pour la jeune Anastasia (qui comme Bella est jeune, naïve et ne comprend pas ce que Grey peut lui trouver, mais c’est pas grave, les balades en hélicoptère c’est sympa !).

Comme tous les romans de ce genre, Cinquante nuances de Grey est le genre de livre dont les pages se tournent toutes seules (et je dois avouer que ça ne fait pas de mal de temps en temps), mais j’ai vraiment eu du mal à être convaincue par cette histoire qui a clairement le cul entre deux chaises.

La juxtaposition de l’histoire d’amour complètement nunuche (ils se connaissent depuis 3 jours et ont déjà rencontré leurs parents respectifs) avec de fréquentes scènes de sexe très détaillées (sérieux, l’endurance des deux héros dans le domaine, c’est fatiguant de les voir copuler comme des lapins toutes les deux pages) ne fonctionne pour moi pas très bien. Et puis je trouve que quelque part ça trahit un peu le postulat de départ pourtant intriguant du mec qui ne fait pas dans les chocolats et les fleurs (mais qui le fait quand même dans le bouquin parce que c’est ELLE).

C’est un peu comme si on avait deux histoires collées ensemble sans qu’elles arrivent vraiment à se lier entre elles (même avec l’aide de la cravate en soie de Mr. Grey). Cette sensation est renforcée par le décalage au niveau des dialogues des personnages, qui alternent sans cesse entre échanges super guindés (avec vouvoiement de rigueur), déclarations complètement mièvres (oh oui ma chérie) et langage carrément vulgaire.

En fait cette juxtaposition improbable est compréhensible uniquement lorsqu’on sait que c’est une réécriture de Twilight avec plus de sexe. D’un coup certains évènements (qui reprennent les livres de Stephenie Meyer) ont d’ailleurs beaucoup plus de sens, notamment lorsque Grey s’indigne du tas de ferraille que conduit sa dulcinée et finit par lui offrir une voiture de rêve. Alors qu’ils sont ensemble depuis quinze jours. Après avoir eu l’approbation du père de la demoiselle. Bonjour le paternalisme primaire *soupir*.

En fait le seul point positif que je pourrais trouver à ce livre c’est qu’il pose la question du plaisir et des multiples façons de le trouver, y compris dans l’espèce de jeu de séduction qu’entretiennent les deux héros par mail. Mais je ne suis même pas sûre que le livre vende vraiment du rêve dans le domaine, avec cette relation un peu unilatérale où c’est le dominant qui se réserve le monopole sur la question de donner du plaisir et où on a le stéréotype de la fille qui n’a jamais eu le moindre rapport sexuel avant de rencontrer Grey et qui enchaîne les orgasmes *re-soupir*.

Du coup, autant je garde une sorte d’indulgence affectueuse pour Twilight (qui n’est pas un grand roman mais dont je comprends parfaitement le succès en librairie), autant j’ai vraiment du mal à me passionner pour ce roman assez déséquilibré et qui ne vend du rêve (je préfère autant lire un bon vieux Harlequin). Par curiosité j’ai quand même lu les résumés des deux tomes suivants sur Wikipédia histoire de savoir comment ça se terminait, et ça ne m’a pas plus donné envie de poursuivre. Du coup je vais pouvoir remettre le roman dans la boîte à livres de mon immeuble !

D’autres avis : y’a 876 avis sur Babelio, vous en trouverez sans doute un qui vous convient !

Bonus : Comme il est passé à la télé, j’ai regardé l’adaptation en film. Le bon point : elle est fidèle. Le mauvais point : mais qu’est-ce que c’est ennuyeux ! J’ai eu pitié des acteurs égarés là-dedans et de la réalisation qui y va avec ses gros sabots dans les cadrages. Ça doit être drôle à voir à plusieurs, quand on est seul, c’est limite gênant !

12 commentaires:

Alys a dit…

MOUHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHA
J'adore ce billet! "Même avec la cravate en soie", je meurs :D :D
Cela dit, c'est l'avis le plus nuancé que j'aie lu sur le sujet. Jusque là j'avais surtout entendu parler du langage totalement vulgaire et insupportable à lire. J'ignorais qu'ils se vouvoyaient par exemple. C'est vrai que c'est super bizarre ce que tu en dis.
Et concernant le film, est-ce que tu as trouvé que c'est dangereux, que ça fait l'apologie des violences conjugales et tout? Je l'avais longuement défendu sur mon blog parce que j'avais lu plein d'articles alarmistes de ce genre et que, si je trouve que ça véhicule une certaine idée pas très moderne des relations hommes-femmes, ce n'est pas pire du tout que tant d'autres films que personne ne critique. (Genre Transformers, tu vois. T'entends aucun journaliste dénoncer le paternalisme de Transformers.)

Lune a dit…

mdr bon c'est intéressant l'histoire de la fanfiction !

Le chien critique a dit…

Ah, enfin de la la bonne littérature sur ce blog pour ados boutonneux !
En tout cas, je salue ton courage pour avaoir attaquer ce monument littéraire. Je me dis souvent, au lieu de te moquer, lis le et après tu critiques. Tu l'as fais, chapeau bas.
Bon après pousser le vice pour voir l'adaptation télé, faut faire gaffe, le deuxième blog 50 nuances de Vert peut vite arrivé...

Baroona a dit…

Euh... bravo ? xD
Y'a quand même un truc que je ne comprends pas vraiment : en quoi c'est encore une fanfiction quand les personnages changent complètement ? Genre là, ça a encore vraiment des rapports à Twilight ?

Vert a dit…

@Alys
Je trouve pas que le film fasse spécialement l'apologie des violences conjugales (pour moi ça s'inscrit vraiment dans un jeu sexuel et Anastasia a toujours la possibilité de dire non), par contre effectivement coté modernité de la relation on repassera (sérieux le coup de la voiture...) mais comme tu dis c'est pas pire que dans d'autres films. Je pense que ça serait pas aussi perturbant si ça se juxtaposait pas à des scènes de sexe dans tous les sens xD

Vert a dit…

@Lune
Ca explique beaucoup (à défaut d'excuser xD)

Vert a dit…

@Le chien critique
Ah ça serait un excellent titre de blog si j'arrivais à convaincre Monsieur de bloguer (vu qu'on a souvent des avis diamétralement opposés xD)

Vert a dit…

@Baroona
Là ça n'a plus d'intérêt en tant que fanfiction vu que les personnages ont changé de nom (vu que c'est un "vrai" roman).
Dans le cadre d'une fanfiction ça permet principalement de voir comment des personnages auraient pu évoluer différemment et avoir une autre relation. Pour ma part j'ai jamais trop compris l'intérêt de ces changements radicaux, par contre les univers alternatifs qui amènent des variations bien traitées c'est sympa ^^.

Tigger Lilly a dit…

Haha, excellente chronique. Je me garderai bien d'approcher le livre, mais j'ai vu le film en avance rapide : c'était nul.
Par contre le voir avec plusieurs, je veux bien mais alors on regarde l'odyssée de l'espace après XD

Vert a dit…

@Tigger Lilly
Uniquement si c'est le 2e film, je suis pas maso au point de revoir le 1er une deuxième fois xD

Acr0 a dit…

Si j'ai lu le premier tome de Twilight pour me faire une opinion, je ne te suivrai pas cette fois donc je suis contente que tu aies écrit une chronique :) J'apprends donc qu'il s'agissait à l'origine d'une fanfiction ! Oui nous avons besoin parfois de lire des livres dont les pages se tournent - presque - toutes seules. Je me souviens justement de ton challenge My summer of (SFFF) love durant lequel on pouvait y retrouver des titres qui correspondent à "se lit facilement". Ceci dit, malgré ton avis, je ne pense pas découvrir cette saga.

Vert a dit…

@Acr0
A choisir il vaut mieux lire Twilight :D