Oh ne prenez pas cet air surpris, ça devait forcément arriver. Je suis complète accro à Doctor Who, j’avais envie de connaitre le début de l’histoire, et j’ai un goût prononcé pour l’archéologie de la Science-Fiction. Forcément, il fallait que je remonte le temps jusqu’en 1963 pour découvrir à quoi ressemblait les aventures du premier Docteur.
Cela m’a pris un peu de temps, parce que ce n’est pas forcément une série qui se dévore à la vitesse de l’éclair. C’est tout de même vieux, en noir et blanc, avec une qualité d’image passable, et question rythme on est très loin des épisodes actuels. Mais arrivée à la fin de la saison, j’étais très contente : les bases de la série sont là, et on se surprend à en redemander !
L’histoire commence sur Terre, dans les années 60. Une jeune fille, Susan Foreman, attire l’attention de deux de ses professeurs à l’école, Ian Chesterton et Barbara Wright, à cause de ses connaissances très avancées dans certains domaines, et son ignorance totale de certaines évidences.
Voulant rencontrer son grand-père qui l’élèvent, ils se rendent à son domicile et découvrent… une décharge (qui contient entre autres une mystérieuse cabine de police bleue), et aucune trace de la jeune fille. Alors qu’ils sont à la recherche, ils croisent un vieux monsieur grincheux un peu cinglé.
L’affaire se complique avec l’apparition de Susan, les deux professeurs découvrent le vaisseau spatial, et le vieux fou qu’est le Docteur refuse de les laisser partir, si bien qu’ils se retrouvent tous à l’époque des hommes des cavernes.
Ils se retrouvent très vite prisonniers de vilains Cro-Magnon (ou équivalent), et doivent mettre de côté leurs différents pour s’en sortir. Et c’est ainsi que tout commence : comme retrouver la Terre à la bonne époque semble compliqué, toute la joyeuse troupe se retrouve à voyager à travers le temps et l’espace, et une certaine complicité finit même par se lier entre eux.
Le Docteur finit par arrêter de massacrer le nom de Ian, et donne même du « my dear » ou « my boy » aux deux professeurs, ce qui ne l’empêche de faire sa petite crise de nerfs de temps en temps, c’est le Docteur après tout.
Je ne sais pas où les scénaristes sont allés chercher l’idée d’un bonhomme pareil, il vous ferait presque passer Eleven pour un type normal (si on omet ses goûts culinaires). Imaginez un peu un vieux fou qui aime rabattre le caquet à tout le monde (ce qui n’est pas toujours l’idéal), lunatique au possible, qui n’hésite pas à manipuler tout le monde pour arriver à ses fins, mais qui en même temps sait prouver qu’il a du cœur, et qui n’hésite pas à secourir qui le demande (même si on ne lui laisse pas forcément le choix au départ, cela ne l’empêche pas d’aller jusqu’au bout).
C’est le Docteur, tout simplement, déjà dans sa première version c’est un personnage étonnamment complexe et anti-héroïque, et au final très attachant.
Il est plutôt bien entouré, il voyageait avec rien de moins que trois personnes à l’époque ! Ian a un rôle typique de héros masculin de l’époque : il se bat beaucoup, fait du feu, pousse de lourdes charges et j'en passe des meilleurs. Et il est professeur de physique, les énigmes du genre le concernent donc avec le Docteur.
Susan, la petite fille du Docteur, est sans doute la moins intéressante des trois (un comble, vu son grand-père !). Disons qu’elle passe un peu trop de temps à hurler et à faire sa chochotte, ce qui peut exaspérer à force (surtout lorsqu’elle est trop fatiguée pour fuir la guillotine, à sa place j’aurais fait un effort, même au bord de la mort !). Et évidemment comme tout personnage féminin, elle a son quota d’enlèvements et tout le tralala…
Barbara aussi, vous me direz (surtout dans le premier épisode où elle ne fait que gémir), mais elle s’affirme très vite comme autre chose, et développer une réelle alchimie avec le Docteur. Elle partage avec lui sa passion de l’histoire (son désir de changer la destinée des Aztèques est très intéressant), et c’est souvent elle qui sauve la situation ou trouve les bonnes idées. Le site
TVtropes (un site que j'affectionne beaucoup, mais je m'égare) résume d’ailleurs très bien la chose :
« the first two seasons could have been renamed The Why Barbara Is Awesome Show, and no one would have noticed. »
Cette première saison de Doctor Who compte 8 épisodes, chacun divisé en plusieurs parties (de deux à sept, de 25 minutes chacune) :
1. An Unearthly Child
2. The Daleks
3. The Edge of Destruction
4. Marco Polo (manquant)
5. The Keys of Marinus
6. The Aztecs
7. The Sensorites
8. The Reign of Terror (incomplet)
Oui, la saison n’est pas complète, certains épisodes ont été perdus, on ne conserve que la bande son et quelques images. Je vous avoue avoir fait l’impasse sur Marco Polo (à mon grand regret), et sur les deux parties manquantes du dernier (heureusement, un résumé existe), parce que les reconstitutions (la bande son + un diaporama), c’est pas hyper passionnant à regarder.
On alterne à chaque fois entre un épisode dans le passé, un sur une autre planète, à l’exception du troisième qui est un étrange huis clos dans le TARDIS, ce qui est dû à des raisons budgétaires : ils avaient tout dépensé dans l’épisode sur les Daleks.
Parce que oui, les Daleks sont là dès le début, le deuxième épisode même. Si ce sont déjà des poivrières qui aiment à exterminer les gens, ils n’ont pas encore l’ampleur des Daleks qu’on connait, ce sont juste des mutants qui vivent terrés dans leur armure de métal, dans leur cité souterraine, sur une planète irradiée. Et on peut même les vaincre en leur taper dessus avec des bouts de bois, c’est dire.
Mais tout de même, ils ont leur petit effet.
Et j’adore le trucage pour simuler l’effet de leur rayon de la mort : on passe l’image en négatif !
De manière générale, je suis très admirative des effets spéciaux utilisés. Ils sont bien sûr, tous visibles à l’œil nu (sans parler des passages où l’on se focalise sur le visage d’un des héros pour ne pas montrer un monstre), mais il y a une volonté de créer l’émerveillement et l’horreur malgré des moyens ridicules qui force l’admiration.
Bien sûr, les vues générales sont des maquettes…
D’ailleurs le mini-TARDIS miniature s’obstine à atterrir dans un bas à sable…
Et puis je pourrais vous parler des extraterrestres qui ont les pieds plats…
Ce sont les sensorites, qui ont quelques points communs avec les Ood (Russel T. Davies reconnait lui même avoir voulu faire quelque chose de semblable aux Sensorites en créant les Ood), et rassurez-vous, leurs têtes sont un peu plus convaincantes.
Mais tout ce côté carton-pâte ne suffit pas à rester coller à l’écran. Ce qui est accroche, dès le début, c’est que les scénarios sont bien fichus. Un peu lents (ils racontent en trois heures ce qu’un épisode moderne de la série fait en cinquante minutes), extrêmement prévisibles, mais tout de même diablement prenants.
Les trois premiers épisodes ne sont pas les plus passionnants : An Unearthly child présente le concept, The Daleks se termine de façon épique mais traine un peu trop au départ, et The Edge of destruction est bizarre, à défaut d’autre qualificatif.
Mais les suivants sont excellents : on voit du pays (The Keys of Marinus envoie nos héros en quête aux quatre coins d’une planète), Barbara essaye de changer la civilisation aztèque (un des sinon le meilleur épisode de la saison, avec des passages très émouvants), on assiste à des complots chez des télépathes (les fameux Sensorites), et on conclut en beauté en pleine période de la Terreur à Paris.
J’avoue avoir beaucoup apprécié les épisodes historiques, qui sont moins des aventures que des mises en scène d’une époque, de façon plutôt intelligente. Il est un peu difficile de juger celui sur la Révolution français, incomplet, mais celui des Aztèques (j’y reviens toujours), est vraiment très chouette. J’aime beaucoup le fait qu’ils abordent aussi bien les points noirs de cette civilisation (les sacrifices humains) que les bons points (le système de retraite pour les anciens).
Et puis c’est le premier mariage imprévu du Docteur, autant dire que c’est un incontournable !
The Reign of Terror, sur la révolution française, est plutôt rigolo en dépit de son sujet (c'est supposé être sinistre, mais le côté carton pâte m'a beaucoup fait rire). Les héros manquent de se faire guillotinés cinq ou six fois, ça complote dans tous les sens, mais surtout, on y croise de la figure historique :
Je doute sérieusement de la véracité historique d’une telle scène, mais son apparition m’a bien fait rire, je pense que vous n’aurez aucun mal à le reconnaitre à son chapeau…
Et puis le Docteur se balade pendant presque tout l’épisode en costume de député, ce qui lui donne une certaine classe :
C’est d’ailleurs ce qui fait le charme de cette vieille série, c’est qu’ils jouent bien plus le jeu lorsqu’ils visitent le passé, n’hésitant pas à adopter une tenue plus locale. De même qu’ils prennent beaucoup plus leur temps que dans les épisodes modernes. Un peu trop parfois même, mais tout de même, imaginez un peu, on voit s’écouler les jours (ils ne restent pas juste deux heures sur une planète avant d’aller rendre visite à Shakespeare), on les voit manger, dormir, parler de faire un brin de toilette avant d’aller visiter une planète !
Et on admirera au passage la superbe machine qui distribue eau et barre de nourriture aromatisée bacon&eggs (c’est des anglais, que voulez-vous) aux passagers du TARDIS…
En fait, la seule chose qui est complètement absente, c’est tout le contexte qui n’a pas encore été développé. Arrivé à la fin de la saison, on ne sait pas trop qui est le Docteur, ni d’où il vient. La seule évocation de Gallifrey, on la doit à Susan qui se souvient de sa planète (sans nom) au ciel orangé et aux feuilles d’argent…
Mais j’imagine que tout cela s’est construit au fur et à mesure, et que ça viendra dans les autres saisons. En attendant, je vais continuer à avancer, même si je ne suis pas sûre d’aller bien loin, ça va se corser quand je n’aurais plus de sous-titres !