Entre deux épisodes de Stargate, je garde toujours un œil sur ce qui se prépare dans le domaine de la fantasy, le pire comme le meilleur… Tenez, par exemple, je suis tombée sur les 10 premières minutes de l’adaptation de l’Epée de Vérité, Legend of the Seeker. Si vous aviez toujours rêvé de voir un cross-over Seigneur des Anneaux x Matrix x Xena (ou Hercule, ça marche aussi), c’est votre chance, ça a l’air très bien parti, au point que j’ai presque envie de voir la suite pour exploser de rire tout du long tellement c’est ridicule (oui je sais, je suis méchante, mais bon les romans de Goodkind ont une meilleur campagne de presse que les Enfants de Hurin, c’est quand même un poil déprimant…)
Comme j’étais dans ma série « nanars de fantasy », j’ai décidé de jeter un œil à Merlin, série de la BBC qui a démarré sous peu avec une bonne audience semble-t-il. Elle raconte les déboires d’un Merlin jeune, ce qui nous donne en mode générique héroïque :
« In a land of myth and a time of magic, the destiny of a great kingdom rests on the shoulders of a young boy. His name… Merlin »
C’est pas vraiment une idée nouvelle, des bouquins et des BDs sur Merlin, il y en a foule, y compris sur sa jeunesse, et qui partent dans tous les sens. Personnellement j’en suis restée à la version de Stephen Lawhead (le tome 2 de son cycle de Pendragon, le meilleur d’ailleurs), matinée d’une touche de Fetjaine (Le Pas de Merlin, un peu décevant dans sa suite), d’une pincée du Codex Merlin de Holdstock, et d’une touche de la BD basée sur l’histoire archaïque, Arthur.
(Oui autant le préciser de suite, en terme de fantasy arthurienne j’ai à peu près lu, et vu tout ce qui se faisait –ou du moins était disponible en France-, même les études sérieuses, ça a été mon dada pendant un moment, c’est dire si je maîtrise le sujet)
Donc pour en revenir à la série, voyons un peu à quoi elle ressemble, à commencer par le héros. Merlin est un jeune homme brun à la coupe de cheveux atroces, aux oreilles en feuille de chou, un peu bobet, toujours souriant et accessoirement sorcier de son état. C’est un espèce de Clark Kent de Smallville en moins baraqué (si si je vous jure, remplacez sa tunique par une chemise à carreaux pour voir), à cela près qu’il est plutôt doué en télékinésie et qu’il est du genre à crier au monde qu’il a des pouvoirs magiques (pas bien malin vu le contexte), sauf que personne ne le croit.
Remarquez, avec un air un poil plus sérieux, il aurait fait un elfe très crédible, moyennant qu'on lui taille les oreilles en pointe
Comme il est incapable de s’en sortir seul, sa mère (mais qui est son père ? Mystère… même si je sens que ce sera moins truculent que dans les légendes…) l’a envoyé au médecin de la cour à Camelot, Gaius, prototype du vieux sage là pour faire la morale à Merlin, le nourrir, l’empêcher de faire des bêtises et accessoirement lui rappeler qu’il a une destinée au moins une fois par épisode…
Par ailleurs, Merlin va très vite faire la connaissance d’Arthur (oui, LE Arthur), blondinet qui a le mérite d’avoir une meilleure coupe de cheveux que Merlin, mais a un peu trop les dents en avant pour dégager le charisme digne d’un tel rôle (comment ça je suis une vraie langue de serpent ?), ainsi que de son père Uther, stéréotype du roi un peu obstiné portant le royaume à bout de bras.
J'avoue, j'ai choisi exprès une photo pas très flatteuse... quelle belle dentition tout de même...
Coté personnages féminins, on se retrouve avec Morgana, pupille du roi (visiblement ni sa fille, ni celle d’Ygraine –non mentionnée jusque là-, du coup on se demande d’où elle sort), qui en pince pour Arthur et fait des cauchemars, et sa suivante, Guenièvre, dit Gwen (genre son nom est trop compliqué à prononcer), grande amie de Merlin dès le départ. Si la première me parait bien placée pour imiter son rôle dans les légendes, la deuxième me laisse plus que sceptique.
Bon là comme ça elles ont l'air super copines, mais n'oublions pas qu'en général dans la légende, celle de gauche ("Gwen") se marie avec Arthur et le trompe avec son meilleur pote, et l'autre couche avec Arthur, lui fait un enfant qui plus tard tuera son père... Les femmes...
Avec quatre épisodes, il est difficile de juger clairement l’histoire, mais on trouve l’éternel modèle de la personne en danger qu’il faut sauver avec quelques retournements de situation pour meubler tout ça… Et pour le moment l’intrigue s’attache à développer la relation entre Arthur et Merlin, mais la suite semble développer d’autres axes (y’a qu’à voir qui apparaît dans le 5e épisode d’après le mini-teaser à la fin du 4).
Bon honnêtement, j’ai passé le premier épisode à soupirer. Pas que l’histoire soit dénuée d’intérêt (disons qu’elle emprunte ses codes à la série pour ados, ça perturbe un peu, déjà Narnia 2 tirait de ce coté là), ni les acteurs terriblement mauvais (ils ne méritent pas un oscar, mais c’est surtout du à leurs rôles je pense). Non, c’est le manque de personnalité de l’ensemble qui frappe.
Les décors, les costumes, l’ambiance, tout est un vaste micmac guère flamboyant. Déjà, l’ensemble est complètement atemporel, avec un gros mélange de tout ce que le moyen-âge et la renaissance ont pu produire (notamment dans l’architecture du château), et qui plus est bourré d’anachronismes : la notion de hiérarchie quasiment inexistante, le fait que tout le monde sache lire et écrire, et ne parlons même pas du moment où Merlin se prend une tomate dans la figure (oui je chipote, mais ça vient d’Amérique ce fruit, figurez-vous, comme la pomme de terre et le maïs).
Oh bien sûr je comprends tout à fait qu’on aie affaire à un Moyen-âge rêvé, une sorte d’idéal comme dans les vieux romans de chevalerie, et qu’en conséquent tous ces détails soient hors de propos, mais tout de même, tout cela manque de personnalité.
Les décors sont quand même affreusement bateaux (au point que je cherche l’escalier de Blois dans la cour, je trouve qu’il y parfaitement avec le reste) avec des joints tellement bien ajustés entre des pierres tellement blanches que c’est à pleurer. Les pièces du château sont d’ailleurs grandes et lumineuses, et un simple serviteur a le droit à une chambre de la taille de son studio (avec un placard, bon ok j’arrête de relever les anachronismes), mais la salle de banquet, elle, manque d’envergure et ne fait pas rêver avec ses deux tables de douze couverts chacune…
Un Camelot idéal, drapeaux flottants au vent sur fond de soleil couchant compris
Même problème pour les costumes, ils sont assez fadasses, sauf les filles qui ont le droit d’avoir des robes longues qui traînent partout. C’est même le pire, les costumes, surtout dans le cas d’Arthur (on pardonnera à Merlin son mauvais goût vestimentaire, c’est un gueux après tout). Qu’il se balade en armure avec sa bande de potes pour aller boire un verre en ville, ça fait parti du mythe, mais était-ce bien la peine de l’affubler de cette sympathique veste longue en daim qui lui donne l’air d’un Aragorn au rabais croisé avec un cow-boy, et pire, la veste courte, toujours la même manière, qui lui donne vraiment l’impression de venir tout droit d’un lycée américain ? Je sais qu’une cape c’est lourd et que ça coûte cher en tissu, mais c’est quand même le minimum syndical pour une fable médiévale…
Vous avez l'impression de ne vous êtres trompés de série ? Moi aussi.
Enfin, dans l'hypothétique cas d'un épisode où ils voyagent dans le futur, ils passeront incognito !
Menfin bon, une fois qu’on a accepté cette ambiance peu emballante (dommage, la fantasy, c’est aussi rêver en voyant les décors), on peut se pencher sur l’histoire. Pour le moment, ça tourne assez au niveau Smallville version mythologie arthurienne, oscillant entre les passages pseudo-épiques et les histoires entre potes (enfin ils ne sont pas encore très potes mais l’idée est là…).
Bref, c’est du pur divertissement, qui se révèle assez drôle (mais au 2d degré), avec son coté gros budget qui ne l’est pas, ses effets spéciaux un peu foireux, son quota de clichés de la fantasy (tournois, potions, bestiaire fantastique et tout le tointoin) et ce coté « nos années collège » en version médiévale… (je me demande si George Lucas autoriserait une série télé du même genre avec les héros de Star Wars, ça pourrait être fun, imaginez). Y’a pas à dire, après une longue journée de boulot, ça détend !
(et accessoirement ça m’inspire vu que j’en suis à ma 3ème page word, mais bon c’est toujours plus facile d’écrire quand on a plein de choses à critiquer, c’est connu !)