Après le traditionnel épisode d'introduction du nouveau Doctor, l'épisode avec les Daleks et l'épisode historique, voilà qu'on s'attaque à un autre grand classique de la série : l'épisode qui fait peur. Tout d'ailleurs laissait entrevoir un nouveau Blink, mais c'est finalement une histoire très surprenante que propose ce Listen. Comme d'habitude, les spoilers sont de la partie, ça ne vous surprendra guère...
« Question ! Why do we talk out loud when we know... we're alone ? Conjecture... because we know we're not. »
On commence donc avec un Doctor en pleine méditation (la classe, sur son TARDIS en plein dans l'espace) qui s'interroge sur une action courante en apparence anodine : parler à voix haute quand on est seul. Forcément, c'est louche, il existe sans aucune doute un monstre invisible (autre que les Silence ou les Vashta Nerada bien entendu) dont on soupçonne seulement l'existence. Merci Doctor, je ne me parlerai plus jamais à moi-même quand je suis seule !
De son côté, Clara se lance dans une grande aventure sociale qu'on expérimente guère lorsqu'on voyage avec le Doctor : un rencart avec Danny Pink, son collègue prof et accessoirement ancien soldat, sauf qu'en affaire de cœur, rien n'est simple.
J'aime d'ailleurs beaucoup la façon dont s'intercalent le avant-après jusqu'à qu'elle rentre dans sa chambre et tombe sur son boulet de Doctor.
« Why do you have three mirrors ? Why don't you just turn your head ? »
Je trouvais déjà que Eleven en tenait une sacrée couche parfois (mais en le faisant exprès), mais avec Twelve, ça en devient presque naturel de le trouver complètement à côté de la plaque (« You said you had a date. I thought I'd better hide in the bedroom in case you brought him home. »). Par certains côtés, il est encore plus alien que son prédécesseur. Mais il a un esprit d'aventure qui fait plaisir à voir, par contre.
« I think everybody, at some point in their lives, has the exact same nightmare. You wake up, or you think you do, and there's someone in the dark, someone close, or you think there might be. So you sit up, turn on the light. And the room looks different at night. It ticks and creaks and breathes. And you tell yourself there's nobody there, nobody watching, nobody listening, nobody there at all... and you very nearly believe it. You really, really try... and then... »
D'ailleurs il ne perd pas longtemps à expliquer à Clara ses recherches sur les monstres invisibles, et ce fameux rêve que tout le monde fait un jour où un monstre sous notre lit vient saisir notre pied. Et voilà qu'il lui refait le coup du lien télépathique avec le TARDIS pour qu'elle revienne à la période de son enfance où elle a eu ce rêve.
Sauf qu'elle est légèrement distraite, et c'est finalement Danny Pink plus jeune qu'elle rencontre ! Et on rentre là dans la séquence la plus flippante de l'épisode, ça faisait bien longtemps qu'un Doctor Who ne m'avait pas hérissé les poils comme ça.
Oh quelqu'un sur le lit !
Oh une forme mystérieuse sous une couverture !
« The breath on the back of your neck... like your hairs standing on end... that means don't look round ! »
Je trouve ce passage absolument génial, car même en ayant vu tout l'épisode on ne sait pas trop quoi en penser, comment l'interpréter. Arriver à rendre une telle atmosphère flippante en ne jouant que sur ce qu'on ne voit pas... c'est vraiment superbe !
- See this one? This is the boss one, the colonel. He's going to keep a special eye out.
- It's broken, that one. It doesn't have a gun.
- That's why he's the boss. A soldier so brave he doesn't need a gun. He can keep the whole world safe.
Avant de partir, Clara prend quand même le temps de réconforter un peu ce pauvre gamin traumatisé, et sans le faire exprès contribue à forger l'avenir de son rendez-vous du soir (enfin de tout à l'heure dans son passé mais dans le futur, enfin vous m'avez compris !). Je suis un peu surprise d'ailleurs qu'elle mette autant de temps à comprendre à qui elle a affaire, ça saute assez vite aux yeux du spectateur.
En tout cas à ce stage, on commence à sentir le timey-wimey qui s'invite dans l'intrigue, et le moins qu'on puisse dire c'est qu'on est loin d'en voir le bout ! Du coup Clara décide de reprendre son rencart en cours de route.
« Then do something for me. Tell me the truth, because I know when people are lying to me. »
Et ça marche du tonnerre ! Cette fois-ci c'est Danny qui prend la poudre d'escampette, et Clara se retrouve en compagnie d'un astronaute en costume, tout va bien.
(d'ailleurs ce costume est tellement associé dans ma tête à Waters of Mars que ça en devient forcément un mauvais présage...)
Contrairement à toute attente, ce n'est pas un vilain tour du Doctor, juste un certain Orson Pink (mmmh quel nom étrange et familier à la fois), un voyageur temporel qui s'est égaré à la fin des temps, et que le Doctor propose gentiment de ramener à la maison. Il paraît que ses ancêtres ont un passé de voyageurs temporels, et il se trimballe un vieux soldat sans arme à l'air fort familier, mais sinon, il n'y a aucune chance qu'il s'agisse d'un descendant de Danny Pink (et de Clara, certainement pas !).
Enfin le voyage du retour est programmé dès que le Doctor aura fini son enquête sur les créatures invisibles. Voilà donc que Clara et le Doctor font le guet devant une porte fermée en plein milieu de la nuit pour résoudre ce mystère. Celle-ci se manifeste en toquant à la porte (ou bien est-ce un bruit du système ?) et le Doctor finit par ne plus résister, il ouvre la porte ! Cela ne lui réussit pas trop et c'est Orson Pink qui le ramène en sécurité.
Et afin d'éviter qu'ils se fassent dévorer par cette mystérieuse créature, Clara s'arrange avec le TARDIS pour déplacer le TARDIS, qui l'emmène... dans une grange, avec un jeune garçon qui pleure dans un lit. Serions-nous de retour à l'époque du jeune Danny/Rupert Pink ? Va-t-on réécrire toute l'histoire de leur famille ? (après tout au point où on en est...)
- He can't just run away crying all the time if he wants to join the army.
- He doesn't want to join the army. I keep telling you.
- Well, he's not going to the Academy, is he, that boy ? He'll never make a Time Lord.
Surprise ! En même temps ce n'est guère surprenant que Clara se retrouve en pleine enfance du Doctor, après tout son histoire à elle est étroitement mêlée à celle du Time Lord.
C'est assez marrant parce que ces dernières minutes sont bien évidemment le moment fort de l'épisode, mais contrairement à certaines histoires où la dernière scène ou le dernier twist sauvent l'intrigue (et font oublier tout ce qui s'est passé avant), cette dernière divergence s'insère à merveille après tout ce qui s'est déjà passé.
Il faut dire qu'on ne s'y attendait pas du tout, l'épisode étant déjà fort riche avec la double intrigue Listen/Pink, mais finalement c'est l'aboutissement le plus logique.
« It's OK. This is just a dream. »
De toutes les hypothèses que j'avais envisagé pendant l'épisode, c'est bien celle que je n'aurais jamais envisagé (pourtant côté timey-wimey on partait dans cette direction sans s'en rendre compte). Et je trouve le concept superbement bien trouvé.
« Listen... This is just a dream. But very clever people can hear dreams. So, please, just listen. I know you're afraid... but being afraid is all right. Because didn't anybody ever tell you... fear is a superpower ? Fear can make you faster and cleverer and stronger. And one day, you're going to come back to this barn, and on that day you are going to be very afraid indeed. But that's OK. Because if you're very wise and very strong... fear doesn't have to make you cruel or cowardly... fear can make you kind. »
On pourra râler qu'encore une fois, c'est Clara qui détermine le destin du Doctor. Après l'avoir aidé à choisir le bon TARDIS, voilà qu'elle lui inculque quelques paroles qui vont le hanter le restant de sa vie. Mais comme c'est le Doctor lui-même qui lui a révélé ces mots, je vous laisse méditer sur l'éternel dilemme de l’œuf ou la poule que cela représente.
En tout cas j'aime beaucoup le fait qu'au final le Doctor ait chassé une chimère (ou peut-être pas, vu qu'on n'a pas vraiment élucidé le monstre/farceur sous la couverture du jeune Danny) basé sur une vieille angoisse d'enfance, c'est assez ironique le tour que prend la situation.
Et c'est fort intéressant, car c'est la deuxième fois qu'on voit le Doctor s'égarer complètement depuis le début de la saison. Après Robin des bois (qui ne peut pas exister, c'est forcément un robot !), cette fois-ci c'était une vraie chasse au dahu qu'il mène pendant tout l'épisode. Je me demande si le vrai fil rouge n'est pas là (d'autant plus qu'aucune allusion à Missy Poppins n’apparaît à priori dans cet épisode, ce qui surprend d'autant plus qu'il est écrit par Moffat himself).
- Where are we ? Have we moved ? Where have we landed ?
- Don't look where we are. Take off, and promise me you'll never look where we've been.
- Why?
- Just take off, don't ask questions.
Bien entendu, il ne serait guère bon pour le Doctor de visiter son propre passé (d'où l'ordre de Clara), mais c'est justement la deuxième chose importante dans cette conclusion : on est revenu sur Gallifrey. Je me fais sans doute des films (comme toujours avec cette série), mais je trouve ça pas du tout anodin. La planète est plus au moins perdue mais en sécurité à l'heure actuelle, mais Clara vient de montrer qu'il est possible de l'atteindre. C'est plutôt une bonne nouvelle pour le Doctor non ?
En tout cas, pour ce qui devait être un nouveau Blink (qui forcément ne serait pas à la hauteur), je dois avouer que Listen m'a vraiment surpris en prenant une direction assez différente, plus personnelle.
Bien sûr c'est du Steven Moffat tout craché par bien des aspects, mais il est plein de surprises, et son intrigue est sacrément dense et complet, jonglant entre la quête du Doctor et la vie personnelle de Clara. Listen se révèle très prenant, et à la fois drôle, effrayant, touchant et intelligent. Bref c'est un sacré morceau d'épisode !