Ayant vu cet épisode dans le train entre deux fêtes de Noël, j'en gardais un souvenir assez flou et il y a fallu un deuxième visionnage en janvier pour pouvoir rédiger cette chronique. Ceci dit c'est plutôt une bonne chose, tant j'avais du mal à rassembler mes idées sur cet épisode de Noël, certes brouillon mais fourmillant de plein de choses qui en font pourtant un excellent moment de Doctor Who (d'ailleurs j'aurais bien applaudi à la fin de mon premier visionnage mais je ne voulais pas faire peur à mes voisins dans le train...).
Comme d'habitude les spoilers sont au rendez-vous, en même temps qu'est-ce que vous faites là si vous ne l'avez pas encore vu ?!
Etrange épisode que The Time of the Doctor, mais il faut dire qu'il n'est pas aidé dès le début. Contrairement au départ de David Tennant qui se préparait sur plusieurs épisodes, celui de Matt Smith s'est greffé bien tard sur l'intrigue, si bien qu'on se retrouve avec un seul épisode pour clore en une heure toutes les intrigues en cours et pour lui rendre son dernier hommage. Lourd programme, ce qui explique sans doute le côté « accumulation » dont souffre cet épisode.
The Time of the Doctor commence un peu comme un conte, avec sa voix-off qui nous parle d'un message diffusé à travers l'univers, qui finit forcément par attirer les curieux à sa source : une petite planète qui ne paye pas de mine, mais qui est protégé par un champ de force.
Les curieux, ce sont évidemment les habituels méchants (Daleks, Sontarans, Cybermen et cie), et bien sûr le Doctor qui ne peut jamais résister à un mystère. Il s'invite donc à la fête en compagnie de Clara, qu'il vient de secourir d'un embarrassant repas de Noël en famille. Après un petit détour par l'église (vous savez, celle des prêtres soldats qu'on a déjà croisé dans les saisons 5 et 6), en route pour le lieu d'où émane le message : un petit village champêtre et enneigé portant le doux nom de Christmas.
Et c'est dans ce village, où il est impossible de mentir à cause d'un mystérieux « champ de vérité » que le Doctor retrouve une vieille amie :
« There you are. What took you so long ? »
Weeping Angels, check. Silence, check. L'église et ses prêtres combattants, check. Effectivement, il ne manquait plus que la mystérieuse faille de la saison 5 pour une bonne réunion de famille, et la voilà ! C'est plutôt malin de la ressortir maintenant, c'est une belle manière de conclure l'histoire (argument que je vais sans doute répéter maintes fois dans cet article).
La faille (provoquée par l'explosion du TARDIS) est en fait utilisé par les Time Lords pour transmettre un message depuis l'autre univers où ils ont été enfermés/mis en sûreté à la fin de The Day of the Doctor. Leur message est une question, la plus ancienne de toutes les questions : Doctor Who ?
Et si le Doctor répond à cette question, ils pourront revenir en toute sécurité. Sauf que la planète étant encerclée par la panoplie complète des méchants de l'univers, s'ils pointent le bout de leur nez c'est toute la Guerre du Temps qui risque de repartir de plus belle. Ce qui ne plaît guère à l'église :
« From this moment on, I dedicate this church to one cause. Silence. »
La boucle semble enfin se boucler sur la question du Silence lorsqu'on apprend plus loin qu'une branche « hérétique » de l'église menée par Madame Kovarian a cherché à régler la question directement en tuant le Doctor. Si on ajoute en prime le fait que la planète s'appelle Trenzalore. Reprenons donc la prophétie de Dorium dans The Wedding of River Song :
« On the fields of Trenzalore, at the fall of the Eleventh, when no living creature could speak falsely, or fail to answer, a question will be asked. A question that must never, ever be answered. The oldest question in the universe, hidden in plain sight. »
Tout y est donc, certes parfois de manière un peu compressée ou artificielle (comme le personnage de Tasha Lem qui semble un peu trop parachuté là pour les besoins de l'histoire), mais c'est tout de même chouette d'avoir enfin à peu près tous les éléments en main, et que ceux-ci s'assemblent dans quelque chose de délicieusement timey-wimey.
En parallèle l'épisode s'occupe de dire adieu au onzième Doctor d'une manière que j'ai trouvée très touchante. Je m'attends à verser des torrents de larme devant The Time of the Doctor, mais il n'en est rien. L'épisode se révèle surtout émouvant, triste certes, mais surtout un bel hommage très juste, jamais larmoyant.
C'est un peu tout le contraire du final de David Tennant (que j'aime beaucoup hein mais qui fait un peu sale gosse quand on met les deux régénérations en parallèle), et c'est marrant de voir justement ce contraste entre les deux incarnations... même si en parallèle je crois que jamais Moffat n'avait écrit d'épisode qui sonnait autant comme du Russel T. Davies (le repas de famille, le gros deus ex-machina...).
The Time of the Doctor s'attache donc à tirer le portrait de ce onzième Doctor, qui finalement restera définitivement ce vieil homme qui ne supporter pas de voir des enfants pleurer, comme l'avait si bien décrit Amy dans The Beast Below (oui 3 saisons en arrière) :
« What if you were really old, and really kind and alone ? Your whole race dead. No future. What couldn't you do then ? If you were that old, and that kind, and the very last of your kind, you couldn't just stand there and watch children cry. »
Bloqué sur cette planète, sentant sa mort venir, le Doctor décide donc de faire ce qu'il sait faire de mieux : protéger les innocents (car comme il le disait si bien « nine hundred years of time and space and I've never met anybody who wasn't important before. »), mais comme d'habitude avec panache !
On retrouve donc les grands discours, les danses ridicules, les manipulations et les mensonges (pauvre Clara qui se fait avoir deux fois !), tous les ennemis emblématiques (Weeping angels, un cyberman de bois, des Sontarans...) et des dessins d'enfants qui évoquent un peu la petite Amelia.
C'est un bel hommage donc, et une belle mort, plutôt inattendue dans cette nouvelle génération de Doctors jusque là plutôt orientés « action » : c'est finalement son grand âge qui cause son décès (exactement comme le premier Doctor, j'apprécie le parallèle). C'est donc sous la forme d'un vieux croulant qu'il défie une dernière fois les Daleks, tout en sachant qu'il n'y aura pas d'autre régénération vu qu'il a épuisé son stock.
Sauf que les Time Lords, grâce à l'intervention de Clara, viennent lui donner un petit coup de main sous forme d'un nouveau lot de régénérations, ce qui règle pour le moment l'histoire de la limite des régénérations, ce qui n'est pas un mal.
C'est une évidence qu'il fallait la contourner ou l'abroger, après tout c'est un reste d'une époque où on n'imaginait probablement pas une telle longévité pour la série. Et puis bon sérieusement, qui voudrait que le Doctor meurt pour de bon ?
Certes tout cela relève du pur Deus ex-machina (avec un petit côté « nananananère » sur les bords), mais j'aime autant qu'on n’ait pas passé quatre heures dessus. Déjà le temps commençait à manquer, et puis on a un nouveau Doctor à rencontrer accessoirement !
« Love from Gallifrey, boys ! »
Car si tout l'épisode est un peu bancal, les dix dernières minutes font complètement oublier le reste tant elles sont... parfaites.
On a donc le dernier numéro du Doctor face aux Daleks, avec un de ses bons vieux discours tonitruants avant régénération. La musique est d'ailleurs très intéressante à ce moment là, parce qu'on démarre sur une sorte de musique d'ambiance qui évoque plutôt l'ancienne série, puis le thème de Gallifrey avant d'enchainer sur une version alternative du
Doctor's Theme de la saison 4.
Parenthèse musicale mise à part, le Doctor profite de sa nouvelle régénération pour faire exploser les Daleks puis se réfugie dans le TARDIS où Clara le retrouve.
Je m'attendais à moitié à voir apparaître directement le nouveau Doctor, mais c'était oublier la règle n°408 « Time is not the boss of you. ». Avant de changer, il prend le temps de se changer, de profiter une dernière fois de son plat favori (ah les fish fingers and custard) et de reprendre une apparence jeune qui permet à Matt Smith de faire ce superbe discours d'adieu !
- It all just disappears, doesn't it? Everything you are, gone in a moment, like breath on a mirror. Any moment now... He's a-comin'.
- Who's coming?
- The Doctor.
- You. You are the Doctor.
- Yep, and I always will be. But times change, and so must I. […] We all change. When you think about it, we're all different people all through our lives, and that's okay, that's good, you gotta keep moving, so long as you remember all people that you used to be. I will not forget one line of this. Not one day. I swear. I will always remember when the Doctor was me.
(non mais sincèrement, même au bout de la 5e fois que je le regarde j'en ai encore les yeux humides)
« Raggedy man… Goodnight »
Les apparitions de la petite Amelia et d'Amy concluent magnifiquement la scène, et bouclent une fois de plus la boucle. Le final de Ten était grandiose, celui d'Eleven l'est tout autant. Dans une veine plus douce et intimiste, mais non moins merveilleuse.
Mon seul regret est l'absence d'un thème original pour cette scène, puisqu'on retrouve Infinite Potential (qui vient de Rings of Akhaten). Ca m'a un peu déçu au début de ne pas avoir de Vale Decem version Eleven, mais je me rends compte finalement qu'elle colle merveilleusement bien à la scène.
En fait c'est un peu comme si Murray Gold avait rendu trop en avance LA musique de la fin de Matt Smith (après tout elle était presque trop magistrale pour un épisode si « mineur »), et finalement maintenant quand je l'écoute, je l'associe immédiatement à la fin de The Day of the Doctor.
Et puis, en un clin d'oeil, entre le douzième Doctor qui comme le veut la tradition est complètement à côté de ses pompes, à s'inquiéter de la couleur de ses reins. A en juger par sa dernière réplique, on ne va pas s'ennuyer non plus avec lui :
« Stay calm. Just one question. Do you happen to know how to fly this thing ? »
On était en train de pleurer et on termine sur un sourire, un authentique épisode de Doctor Who donc !
Pfiou, en tout cas ça me fait tout bizarre de dire au revoir à Matt Smith. Quand j'ai découvert la série on en était déjà à la saison 5, si bien que c'est le seul Doctor que j'ai vraiment suivi « en live » (ce qui explique que ce soit un peu « mon » Doctor).
Passer derrière David Tennant n'était vraiment pas une partie de plaisir à mon avis, et je pense qu'il a brillamment réussi à l'égaler avec ses excentricités (alimentaires et vestimentaires), ses grands gestes, ses manipulations et ses moments sombres, et surtout cette incroyable capacité à avoir l'air bien plus vieux qu'il ne l'est en réalité. Je le trouve même meilleur pour certains aspects mais c'est purement un ressenti personnel.
Je suis bien triste de le voir partir, mais bizarrement je ne m'inquiète pas trop pour son successeur. Peter Capaldi m'a l'air plein de promesses. Cela me fait plaisir de revoir un « vieux » Doctor (ça devrait changer un peu la dynamique avec Clara), et avec le fil rouge de Gallifrey je doute qu'on s'ennuie dans les saisons à venir. Je ne dirais pas non ceci dit à un retour à un format plus classique : pas de coupure à mi-saison et plus d'épisodes stand-alone plein d'aventures étranges et formidables, ça ne ferait pas de mal après toutes ces intrigues tarabiscotées.
Et en attendant la saison 8 cet automne, je n'ai plus qu'à reprendre le visionnage des anciennes saisons !