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samedi 8 juin 2024

Protectorats – Ray Nayler

Couverture de Protectorats, un recueil de Ray Nayler

J’ai découvert Ray Nayler grâce à sa nouvelle Père, publiée dans Bifrost, et j’avais hâte de continuer à explorer son œuvre avec d’autres textes. C’est désormais chose faite avec ce superbe recueil de nouvelles.

Protectorats a été publié dans la collection Quarante-Deux du Bélial’. La sélection des textes a été faite par Ellen Herzfeld & Dominique Martel, qui étaient déjà à la manœuvre sur d’autres recueils tels que La ménagerie de papier, Jardins de poussière ou La fabrique des lendemains. Autant dire que je m’attendais à de la qualité et je n’ai pas été déçue.

La façon dont les textes ont été choisis et assemblés n’a rien d’anecdotique, et on s’embarque dans un voyage formidable pour découvrir les univers de Ray Nayler. On pourrait presque dire son univers, car la plupart des nouvelles (peut-être même toutes) s’inscrivent dans un même ensemble.

Celui-ci est une uchronie où la découverte d’une soucoupe volante pendant la Seconde Guerre Mondiale a changé le cours de l’Histoire et permis l’acquisition de nouvelles technologies. De là découle la création de robots, le lancement de missions d’explorations spatiales au-delà du système solaire et des systèmes permettant de contourner la mort.

On va faire simple : j’ai adoré ce recueil. Chaque nouvelle est passionnante, avec des idées de SF intéressantes et surtout beaucoup d’émotions. Le ton est souvent très triste, mais pas non plus dans une veine complètement déprimante. On est plus dans une forme de douce mélancolie.

Voyons un peu dans le détail maintenant les différentes textes :

Mélopée pour Hazan est peut-être le texte que j’ai le moins aimé (comme quoi il ne faut jamais s’arrêter à la première nouvelle) parce qu’il jargonne beaucoup au début. Mais c’est intéressant de le placer là, il donne bien le ton et c’est intéressant d’y revenir plus tard pour tracer des liens avec d’autres nouvelles.

Je crois que je n’ai pas tout compris ce qu’il se passait dans Mutabilité (pour le coup il mériterait aussi une relecture a posteriori), mais j’ai été charmée par son ambiance, dans un Istanbul à la fois futuriste et sans âge, assez intemporel.

Ensuite, j’ai relu Père. Ce texte m’avait broyé le cœur la première fois. Ça marche aussi la deuxième fois, sachez-le.

Les Boucles de désintégration et Une fusée pour Dimitrios mettent en scène les mêmes personnages autour d’une technologie qui permet de visiter les souvenirs des morts. Ce sont les textes qui donnent le plus de contexte sur l'univers de Protectorats, j'ai bien aimé tout ce qu'ils donnent à voir sur l'uchronie qui a construit ce monde (et le duo de héros est sympathique aussi).

On change radicalement de sujet avec Les Yeux de la forêt, un des rares textes à s'éloigner de la Terre pour nous confronter à l'Autre dans toute son altérité et son étrangeté, c'est très réussi.

On reste ensuite dans la visite d’autres mondes avec Sarcophage, même si les enjeux ne sont pas les mêmes. C’est un beau récit triste sur l'exploration et la solitude.

L’Hiver en partage explore le concept de morts qui continuent leur vie sous forme d'êtres virtuels, et qui prennent ponctuellement corps dans des « vacants » (ce qui rappelle un peu la série Upload mais pas du tout dans le même genre). C’est un très joli récit.

Dans Retour au Château Rouge & Le Réparateur de moineaux, on retrouve les idées déjà exploités de consciences téléchargées dans des corps, d'exploration spatiales et de place des robots dans la société. Encore de très beaux textes (tristes aussi, vous commencez à saisir le truc).

La Mort de la caserne de pompiers n° 10 est une déclaration d'amour à un bâtiment, j’ai trouvé ça superbe et très bien amené.

On retourne ensuite dans l’espace avec Les Enfants d’Evrim, un récit sur l’isolement et la solitude, très poignant.

La Pluie des jours met en scène des personnes âgées dans un Ehpad assez original. C’est mélancolique une fois encore, mais pas si déprimant que cela.

Le recueil se termine sur Les Hirondelles de papier, un compte rendu d'enquête sur un phénomène mystérieux, curieux et... ça ne vous surprendra pas si je vous dis que ce n’est pas très réjouissant.

Alors oui je sais, à première vue ça a l’air complètement déprimant tout cela mais en fait non. On est plutôt sur une sorte de douce mélancolie teintée d’acceptation, c’est triste certes, mais c’est aussi très doux. J’ai trouvé le ton très agréable, et les idées exploitées sont intéressantes, alors n’hésitez pas à lire ce recueil qui est vraiment très chouette.

Infos utiles : Protectorats est un recueil de Ray Nayler paru aux éditions du Bélial’ en 2023. Sélection des textes réalisée par Ellen Herzfeld et Dominique Martel. Traduction de Henry-Luc Planchat. Couverture de Manchu. 429 p.

D’autres avis : Au pays des Cave Trolls, Les Chroniques de FeyGirl, Le dragon galactique, Les lectures du Maki, Quoi de neuf sur ma pile, RSF Blog

7 commentaires:

  1. Super ! Il est vraiment bien ce recueil, une de mes meilleures lectures de l'année jusqu'ici. As-tu une nouvelle préférée ?

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  2. Il y a vraiment de très bons textes dans ce recueil et rien n'est mauvais. Bref comme tu le dis, un chouette recueil !

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  3. Trop bien. Ça a l'air trop bien. Je suis allée relire l'avis de Tigger Lilly (car je l'avais oublié, évidemment) et ça a l'air trop bien. Voilà, un avis tout en nuance, mais c'est ce que ça m'inspire.

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  4. Merci de me rappeler l'existence de "Père". Je savais qu'il fallait que je lise ce recueil, mais le souvenir de cette nouvelle ravive totalement pourquoi c'est une lecture obligatoire. En plus, bien sûr, du travail des Quarante-Deux qui est déjà un argument en soi, et des avis comme le tien qui donnent envie. ^^

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  5. @Tigger Lilly
    Je dirais Père, Les Yeux de la forêt et L'hiver en partage (oui je sais ça fait 3 😄)

    @Le Maki
    Très chouette même !

    @Alys
    Y'a plus qu'à le lire 😉

    @Baroona
    Ravie d'être là pour faire la piqûre de rappel :)

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  6. Oui, bon d'accord, un jour, il faudra que je me penche là-dessus. Mais pas tout de suite.

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  7. @Shaya
    Je m'inquièterais si tu te jetais sur un recueil de nouvelles 😉

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