Poul Anderson fait partie de mes auteurs favoris de ces dernières années, mais mis à part dans dans le cadre de quelques nouvelles, j’avais surtout abordé son volet SF, alors qu’il a écrit pléthore de textes de fantasy. A vrai dire j’avais fait une tentative il y a dix ans avec La Saga de Hrolf Kraki et je n’avais pas dépassé la troisième page… heureusement comme vous allez le voir, les goûts évoluent (et s'améliorent bien sûr) avec le temps !
L’épée brisée est un roman paru en 1954 aux États-Unis et qui n’avait jamais été traduit en France à ce jour. Ce qui donne l’impression d’avoir un sacré train de retard, mais on a l’habitude avec Poul Anderson, et heureusement le Bélial est là pour combler les trous !
Nous voilà partis en Angleterre médiévale, pour suivre l’histoire d’un enfant échangé au berceau et élevé par des elfes. Skafloc se révèle vite un jeune prodige qui excelle dans tous les domaines, sauf que des choses terribles se trament dans l’ombre : les trolls préparent la guerre, une sorcière cherche à se venger, et les Ases ont aussi leur mot à dire dans l'affaire.
On plonge donc dans une histoire qui mêle allègrement vikings et premiers chrétiens d’Angleterre, créatures féériques anglo-irlandaises et mythologique nordique, le tout relevé d’une bonne dose de magie et de destinée avec prophétie en option. Difficile de ne pas faire le parallèle avec les sagas nordiques, on a presque l’impression que l’auteur n’a rien inventé et se contente de remettre au goût du jour un vieux récit.
L'épée brisée se révèle être un de ces textes qui donne l'impression d'avoir mis la main sur un manuscrit ancien, un mythe primordial qui doit forcément se balader quelque part dans l'inconscient collectif tellement il nous captive. Un peu d’ailleurs comme Même pas mort que j'ai lu juste avant et qui partage une certaine similarité dans l’esprit (même si la forme est très différente).
Le ton est clairement celui d’un conte ou d’une épopée (morceaux de chants inclus), plein de sang et de fureur, de petits moments de joie et de grands moments de désespoirs. Et je me suis régalée de tout ce panthéon mythologique et féerique qui se mélange allègrement (on n’est pas loin du crossover !).
Du coup L’épée brisée est une lecture que j’ai savouré (dévoré serait peut-être plus approprié). L’intrigue est certes assez prévisible (en même temps quand on part avec une prophétie…) mais c’est justement ce qui fait que c’est délicieux, tout ce qu’on attend arrive logiquement à point nommé (et oui c’est parfois aussi important que la capacité de l’auteur à nous surprendre).
A noter qu'en 300 pages, Poul Anderson livre donc un texte extrêmement riche et plein de péripéties, mais ne s’embarrasse nullement de milliers de détails inutiles qui auraient nécessité un roman deux fois plus épais. Et c’est vraiment cette fantasy « à l’ancienne » comme je l’aime ! Du coup pour les amateurs de grands cycles de fantasy moderne, L’épée brisée doit sembler un peu désuet comme texte, mais si vous aimez la mythologie et les récits volontairement datés, ce roman ne peut que plaire.
Par contre il y a un truc qui m’a déçu dans ce livre, c’est la préface de Michael Moorcock qui met systématique L'épée brisée en opposition avec Tolkien. Peut-être qu'en grande fan de Tolkien je n'ai pas aimé qu'on critique le Seigneur des Anneaux, mais surtout j'ai trouvé dommage de proposer un tel texte en guise de présentation, du coup on est obligé de lire L'épée brisée en regard de Tolkien, sans lui laisser avoir sa propre vie.
Surtout qu’au final la comparaison se fait naturellement, mais pas avec Le Seigneur des Anneaux. Avec Les enfants de Hurin par contre, assurément. Il est flagrant que ces deux œuvres s'inscrivent dans une même démarche de recréation d'une mythologie, et les similitudes au niveau des personnages et de l'intrigue sont trop nombreuses pour qu'ils n'aient pas exploité les mêmes sources. Bref d’ordinaire je suis plutôt du genre à chanter l'excellente des préfaces et des postfaces dans les ouvrages du Bélial, mais cette fois-ci j’ai été plutôt déçue.
Rassurez-vous, cela n'enlève rien à l'intérêt du roman, mais si vous vous lancez dans la lecture, oubliez les premières pages (cela vous épargnera moult spoilers en plus) sous peine de vous retrouver comme moi à vitupérer dans votre chronique ! Quant à moi, me voilà définitivement réconciliée avec la fantasy de Poul Anderson, je vais donc m’intéresser aussi à ses œuvres dans le domaine, et peut-être même redonner une chance à La Saga de Hrolf Kraki.
Un vrai petit plaisir de fantasy "mythique".
RépondreSupprimerAnderson semble avoir beaucoup joué avec ce genre en fait, et ce n'est pas "La saga de Hrolf Kraki" qui me fera dire le contraire. Je suis en plein de dedans, et c'est encore plus proche par le style des sagas islandaises (en moins aride quand même) que "L'épée brisée".
Pour moi ça passe très bien, mais je suis dans une période 100% vikings en ce moment, je ne suis pas tout à fait objectif... ;)
@Lorhkan
RépondreSupprimerTant que tu débarques pas aux Utos hache à la main, tout va bien :D
Parfaitement d'accord avec toute ta chronique, c'est un excellent livre ! =D
RépondreSupprimerEt toute ces comparaisons avec Tolkien, pas seulement dans la préface mais aussi dans certaines chroniques, m'a moi aussi énervé et dérangé.
@Baroona
RépondreSupprimerTout à fait, surtout que pour moi la comparaison sera forcément en faveur de Tolkien, du coup c'est triste pour les autres ^^
Je veux le lire! :) :(
RépondreSupprimer@Alys
RépondreSupprimerPourquoi le smiley triste du coup ?