J’ai montré sa couverture mega-top-chouette à tout le monde, j’en ai vanté les mérites dès que je trouvais quelqu’un de compréhensif, et maintenant je peux enfin le crier au monde, ce bouquin est un petit bijou.
Oh bien sûr il ne révolutionnera pas la vie, l’univers et le reste, mais ça faisait bien longtemps que je n’avais pas lu un roman de la licence Star Wars avec autant de plaisir, un sourire débile plaqué sur le visage pendant la moitié des pages, sans parler des pouffements pas discrets dans le métro. Venant de la part d’un roman Star Wars en anglais (croyez-moi, entre les abréviations non explicités et les combats spatiaux parfois confus riches en théories ésotériques sur la gravité, ce n’est pas facile de s’accrocher), c’est pas banal.
En même temps, rien qu’à le voir, c’est prometteur. Une couverture un peu vintage, limite kitsch. Un titre qui fait un peu nanard sur les bords. Une histoire qui se déroule peu de temps après le Retour du Jedi, une des périodes les plus sympathiques de la chronologie. Et Matthew Stover aux commandes. Le Matthew Stover.
Pour ceux qui auraient raté
mon précédent laïus à son sujet, ce monsieur a écrit trois romans SW sans compter celui dont je vais vous parler, et ils sont tous des incontournables. Outre
Point de Rupture (où Mace Windu, vous ferait presque passer Yoda pour un bouffon), il a signé la novélisation de l’épisode III (qui réussit l’exploit d’être plus intéressante que le film), et
Le Traitre, un des romans les plus déjantés du
Nouvel Ordre Jedi dont on ne sort vraiment pas indemne (comment ça le coté obscur n’existe pas ?).
Mais revenons à nos moutons galactiques, à savoir Luke Skywalker & the Shadows of Mindor. Nous sommes un an après le Retour du Jedi. L’Alliance Rebelle est devenue la Nouvelle République, et elle entreprend peu à peu de regagner du terrain sur l’Empire, qui lui décide de jouer le jeu de la Rebéllion : attaque de convois, bases secrètes, piratage…
Dans ce contexte étrange où les rôles sont comme inversés, le Général Luke Skywalker (qui vient de prendre du galon), est envoyé avec une belle flotte de combat sur la planète Mindor pour mettre fin aux agissements d’un de ces impériaux reconvertis, le mystérieux Lord Shadowspawn.
L’affaire n’est pas simple car la planète est entourée par un champ d’astéroïdes hautement instable, qui ne facilite pas la navigation. Et que le mystérieux Lord Shadowspawn a plus d’un tour dans son sac. Inutile de dire qu’au bout de quelques pages, la situation bascule dans le chaos le plus absolu, et c’est toute la bande de vétérans (Han, Leia, Chewie, Lando, les droides et l’escadron Rogue) qui vont se précipiter pour essayer de sauver une situation plus que catastrophique.
Dès les premières pages, on a l’impression d’être de retour à l’époque des vieux Star Wars : combats perdus d’avance bourrés de retournements inattendus, vaisseaux branlants, traversée de champs d’astéroïdes, répliques qui fusent dans tous les sens, stratégies complètement barrées, et même un duel au sabrolaser…
Quoique pour un roman mettant Luke en scène, l’arme emblématique de Star Wars est sérieusement sous-utilisée. Il n’y a rien d’hérétique là-dedans, Luke est devenu un Jedi, un vrai de vrai (vous vous souvenez de la différence entre l’épisode V et le VI ? Imaginez la même chose entre le VI et ce livre), il n’a donc plus besoin de faire le mariole avec son épée lumineuse pour le prouver.
A quelque part entre Obi-Wan Kenobi et Anakin Skywalker période Clone Wars dans sa manière d’agir, il a vraiment la classe. Bien qu’en permanence tourmenté par sa place à jouer dans l’univers, la frontière entre lumière et obscurité et tout le tralala, quand il commence à agir, il est juste excellent. Et terrifiant aussi. Efficace, et avec un sens de la réplique qui vaut bien celui de Han. Et tout le monde l’écoute parce que c’est un Jedi. Bref, il est génial !
Les autres personnages ne sont pas en reste. Han est excellent (dans l’introspection comme dans l’action et les répliques mordantes), Lando mémorable (on comprend mieux son grade de général, ce type a un don pour ça), Leia s’en sort pas mal quand elle s’y met même si elle n’a pas forcément un rôle de premier plan. Même R2-D2 et C3PO ont leurs heures de gloire. Pour R2, on a le droit à un point de vue interne, imaginez un peu la chose (très réaliste, aussi fou que cela puisse paraitre).
Contrairement à la plupart des romans Star Wars, l’action n’est pas explosée à travers la galaxie mais se déroule uniquement autour de Mindor, et c’est un plus indéniable. Au lieu de disperser les intrigues, on a ici le temps de bien faire le tour de l’histoire, et on ne s’y ennuie jamais. Un des passages du début où ils partent l’un après l’autre à la rescousse de Luke est juste mémorable. A en pleurer de rire ou presque.
On rigole en effet beaucoup dans ce livre, un peu comme dans un Star Wars. Outre des dialogues bien peaufinés et des situations parfois un peu folles, Matthew Stover s’est amusé à glisser pas mal de clins d’œil à l’univers étendu (on croise quelques personnages qu’il avait utilisé auparavant) et aux films, à commencer par la présence d’un holothriller (un film quoi) nommé Luke Skywalker and the Jedi’s Revenge, une belle allusion au premier titre du Retour du Jedi (laissé de coté parce qu’un Jedi ne se venge pas, pour citer George himself).
L’auteur s’offre aussi quelques délires bien dans son genre avec une belle mise en abîme entre lui et les auteurs d’holothriller dans Star Wars. C’est tourné de telle façon que selon si on lit ou non le prologue et la conclusion, on peut interpréter complètement différemment le bouquin.
En fait le seul point négatif à relever est le méchant de l’histoire qui ne m’a pas botté plus que ça. Une espèce de sith différentiel toujours plus fort toujours plus vil, il n’est pas très convaincant et je trouve que ça ne colle pas trop à l’époque en plus (plutôt marquée par des gens géniaux mais « normaux », comme Thrawn ou Isard…). Il se repose beaucoup sur l’« alchimie sith », ce qui est un terme assez ridicule (imaginez le professeur Rogue avec un sabrolaser !).
Menfin comme il est plus ou moins recyclé d’ailleurs d’après ce que j’ai compris, Stover n’avait peut-être pas beaucoup de marge de manœuvre non plus.
Bref vous l’aurez compris, pour qui aime l’univers de Star Wars, ce livre est un petit délice, et il a l’avantage d’être accessible à tous, pourvu qu’on ait vu les films. Le casting est connu, à l’exception de quelques personnages mais on peut faire complètement abstraction (il m’a fallut Wookieepedia pour les replacer personnellement…). Et l’intrigue est purement indépendante du reste de l’univers étendu.
Bon bien sûr c’est un roman Star Wars, ça ne changera pas la face du monde ni de la science-fiction, mais c’est extrêmement divertissant, comme un film Star Wars somme toute. Alors si un jour vous viens l’idée débile de voir à quoi ressemble un livre Star Wars, optez pour celui-ci.