Cela faisait bien longtemps que ce roman dormait dans ma liseuse (qui elle-même dormait dans un tiroir), alors que j’avais voulu le lire pour me frotter à un Paolo Bacigalupi facile d’accès. Il était grand temps que je m’y mette, d’autant plus que ce Ferrailleurs des mers s’est révélé une lecture fort plaisante, un roman jeunesse à la fois accessible et exigeant.
Dans un futur où le réchauffement climatique a provoqué une montée des eaux qui a englouti de nombreuses terres et le monde tel que nous le connaissons au passage, Nailer est un jeune garçon qui travaille sur un chantier de récupération de navires. Sa mission : parcourir les coursives abandonnées et parfois risquer sa vie pour ramener du cuivre et d’autres métaux précieux.
On se croirait en Inde de nos jours, nous sommes en fait dans ce qu’il reste de la côte Est américaine (si je ne me plante pas), et l’aspect futuriste ne se perçoit que de loin pour Nailer et ses voisins de bidonville, lorsque passe un de ces majestueux clippers de riches qui naviguent et parfois volent au-dessus de l’océan. Le parcours de Nailer prend cependant un drôle de tournant lorsqu’il découvre un clipper échoué suite à un ouragan.
La trame narrative peut certes sembler assez classique (ah ces enfants qui deviennent des héros en sauvant des princesses et en affrontant leur père !), mais c’est bien le seul aspect « simpliste » de ce roman. Cependant elle fonctionne très bien et a l’avantage de donner tout l’espace nécessaire à l’auteur pour poser son univers.
Et de ce côté on se régale. Les romans jeunesse, du moins quand on les lit avec des yeux adultes qui ont déjà trop lu, donnent souvent l’impression d’un décor en carton-pâte. On trouve l’univers sympathique, mais lorsqu’on commence à creuser un peu, on se rend vite compte qu’il n’y a pas grand-chose au niveau des fondations.
Ferrailleurs des mers repose lui sur une base solide et très crédible : la montée des océans, l’épuisement des ressources qui amène à aller récupérer ce qui peut l’être dans les épaves, le pétrole devenu une rareté… Tout est bien pensé et fait réfléchir parce qu’on peut facilement penser qu’on est à deux doigts de basculer dans ce futur.
Et le roman ne ménage pas son lecteur. Tout du long à travers son héros, il nous interroge autant sur des grandes thématiques comme l’inégalité que sur des petites choses comme l’amitié et la confiance. J’ai d’ailleurs beaucoup Nailer pour cela, d’autant plus qu’il a plutôt un bon sens de la réplique.
« Ca fait foutrement beaucoup d’argent. Et, si tu penses que t’as une moralité, c’est parce que t’as pas besoin d’argent. »
Bref Ferrailleurs est un chouette roman, prenant dans son histoire et avec un univers soigné. Il est à prescrire à tous les jeunes amateurs de science-fiction, mais aussi aux plus grands qui auront également grand plaisir à le lire, avant d’aller voir ce que Paolo Bacigalupi a pu écrire d’autre.
Item 14 : Lire un livre de cli-fi (climate fiction). Ou éco-fiction (pour écologie fiction)
(j’aurais pu l’utiliser pour l’item 6, mais je me connais, il y a plus de chance que je croise la route d’un young adulte que d’un livre de cli-fi… et accessoirement il existe une suite à ce roman, je n’ai pas dit mon dernier mot !)